Le Ramougn…

Pyrénées, Aquarelle du Pic Ramougn dans le Massif du Néouvielle

Une vague de brebis déferle sur le col de Portet, écume blanche et mouvante, le reflux les porte sur l’autre versant. Écueil solide, impassible, faussement indifférente dans cette marée moutonnante, la bergère laisse son chien poursuivre la houle.
Mes pieds trouvent le sentier, déterminés à me porter en altitude, sur les rives lointaines des lacs de Bastan. Je contourne une colline et ma détermination s’envole. Surprise, émerveillée, fascinée, je découvre une pyramide rocheuse digne du monde des Pharaons. Fraiche, née avec le matin dont la luminosité délicate révèle sa tenue de gris perlé. Elle se dresse fière, presque insolente, consciente que le bleu délicat du ciel la met en valeur. Le Ramougn ! J’entends encore l’appel des lacs lointains, mais je ne résiste pas au plaisir de peindre, ici et maintenant.
Le temps me donnera raison. L’après-midi, sur le chemin du retour, malgré tous mes efforts pour accélérer la cadence, je ne parviendrai pas à distancer l’orage qui colle à mes basques. Les larmes du ciel ont délavé, les couleurs, étouffé les contrastes, fondue la pyramide et le massif du Néouvielle en un infâme magma de gris. Le vert de l’herbe détrempée sous mes pieds est le dernier vestige d’un monde en couleur à présent englouti, mais précieusement préservé dans l’Arche de mon aquarelle.

texte retranscrit par Philip Ribe